LA CONFIANCE MALGRE TOUT
Notre monde, tenaillé par la peur du lendemain, l’obsession du manque à gagner, la quête fébrile de tout ce qui peut se saisir jusqu’au consumérisme érigé en système, courant sans cesse après des assurances en tous domaines, est, finalement, par trop désemparé. Ne souffre t- il pas d’un manque de confiance ?
Il est bien clair que, sans un minimum de confiance mutuelle, notre vie, en quelque domaine que ce soit, serait comme vouée à l’échec.
Est-il rien de plus triste que de perdre la confiance de quelqu’un qui vous estimait, ou de perdre confiance en l’un de vos proches ?
On ne peut être sûr de soi même ni d’aucun homme, car nous sommes tous fragiles, versatiles.. Dans un monde souvent marqué par l’absurdité, on se demande parfois comment la confiance peut encore surgir avec une telle discrétion obstinée.
LA CONFIANCE QU’IL FAUT AVOIR A L’EGARD DE SOI MEME
La confiance à faire aux autres a pour préalable la confiance à vivre en soi-même. Il ne saurait bien sûr s’agir ici de présomption dangereuse ou d’assurance orgueilleuse dont on peut mesure chaque jour les ravages. " Il rabaisse les superbes et relève les humbles."
L’humilité est dans la vérité.
Une des plus grandes tentations de l’homme, c’est la défiance de soi. Il est frappant de voir combien, souvent à côté de fausses assurances, l’homme manque de confiance en lui-même. Or il est nécessaire pour notre paix intérieure et pour parvenir, à notre tour, à faire confiance à ceux et celles qui nous entourent, de vivre déjà cette confiance au dedans de soi.
La confiance constitue un des noyaux de base de l’estime de soi. L’estime de soi, c’est cette petite flamme qui fait briller le regard lorsqu’on est fier de soi, mais peut vite s’éteindre au moindre sarcasme et critique de l’autre. L’estime de soi est liée à la capacité de reconnaître sa valeur personnelle et de s’aimer comme on est.
La confiance n’est ni naïveté ni prétention mais certitude.
LA CONFIANCE QU’ON DOIT ACCORDER AUX AUTRES
La confiance ne nous est donnée que pour être transmise et échangée.
La confiance est un sentiment de sécurité éprouvé par celui qui se fie à quelqu’un. Elle n’est pas innée, elle se construit jour après jour.
La méfiance suscite la distance. La confiance provoque le rapprochement. Il est certes engageant, parfois risqué, de faire confiance. Il est vrai qu’elle peut être parfois quelque peu déçue. Mais c’est aussi en la donnant qu’on la gagne. C’est en la renouvelant qu’on la consolide et qu’on l’édifie.
Soyons vrais : le manque de confiance en l’autre suppose une double erreur de regard, et sur l’autre et sur soi-même. Sur l’autre, qui est ainsi mésestimé ; et sur soi-même qui est alors surestimé. C’est en ce sens que Pascal a pu si bien dire que "le moi est haïssable. Il est injuste en soi en ce qu’il se fait le centre de tout. Il est incommode aux autres, en ce qu’il veut les asservir." Inversement la confiance en l’autre fait grandir dans l’humanité.
Alors la vie devient possible. L’atmosphère respirable. Les rapports humains deviennent apaisants.
Nulle réussite professionnelle ne tient sans confiance échangée entre hiérarchie et collaborateurs.
LES LIMITES DE LA CONFIANCE
Il est clair que la confiance a des ennemis et non moins évident qu’elle a aussi ses limites. La naïveté imprudente, par exemple, ou l’assurance présomptueuse. La confiance se donne ; mais elle se mérite aussi.
Il y aussi le pharisaïsme de l’autosatisfaction qui a la fragilité de tout ce qui s’appuie sur la seule confiance en ses propres actions. L’autoritarisme étroit qui enferme. On serait alors sans vraie confiance, coupé des autres et rivé sur soi. On n’est plus loin de l’intolérance qui rejette au dehors et de la prison qui boucle au dedans. On verse dans cela quand on veut tout encadrer dans des " devoirs " et des " droits ". La vie sociale est établie sur des compromis.
VIVRE LA CONFIANCE
Il ne saurait, cependant se décourager. Nous avons la force de l’espérance. A vrai dire, il n’y a de confiance possible que dans l’espérance, puisqu’elle est toujours, par définition, un pari sur l’avenir.
La confiance n’a pas à obscurcir la clarté du discernement ni à s’affaiblir en crédulité.
La confiance se nourrit de patience. Partout où elle s’infiltre, la confiance harmonise les relations.
L’un des termes grecs pour exprimer la confiance implique non seulement l’idée d’assurance, mais aussi celle de courage (tharos). Face à l’épuisement, la tristesse, le vide, la mort même, la confiance ressemble ainsi à des yeux qui s’ouvrent grandement à un regard d’espérance et de vie. La langue allemande connaît cette curiosité d’employer un seul mot pour exprimer deux verbes " faire confiance " et " oser ". C’est que la confiance implique un bon bout de courage ! ! La confiance ne se calcule pas, ne compte pas, elle se lance et se risque.
Ne s’agit-il pas d’un pari sur l’autre et sur l’avenir ?
Mais, comme il est bon et beau de faire confiance à l’autre.
Quelle vraie confiance nous pouvons semer et partager en ce monde qui en est tant assoiffé ! !