CRISE DE TRANSMISSION
La nouveauté emblématique des années 60, c’est la relation entre les générations qui s’est inversée voire déconstruite.
Il est aujourd’hui presque naturel de dire que les enfants savent mieux, et comme spontanément user des biens que le génie technique des parents a créés.
La génération de l’informatique, c’est celle qui n’a pas vingt ans, c’est elle qui nous apprend à user (et nous pensons : abuser) de l’outil que nous avons inventé !
Cette inversion dans le rapport des générations était déjà là en germe, il y a quarante ans. D’une autre façon. On avait reconstruit un monde, après les destructions des années quarante.
Mais avait-on pensé les fondations ?
Certains l’avaient fait, certes, comme les pères de l’Europe nouvelle.
Peut-être ne furent-ils pas suivis, ni vraiment compris.
La peur, l’angoisse de recommencer les horreurs criminelles ont été fortes, mais pas au point de les empêcher, puisqu’elles n’ont pas cessé dans nombre de dictatures, dans des centaines de conflits locaux qui dispensaient paraît-il d’un nouveau conflit généralisé.
Aussi bien une génération préféra-t-elle ne pas affirmer de certitudes trop dogmatiques ; la génération suivante ne savait pas de qui recueillir une vraie quête de bonheur ; et celle qui a suivi, les enfants de 68, s’est parfois vue comme « les fils de personne ».
La fin de cette décennie, ce fut encore la stupeur devant la croissance ahurissante de la population mondiale, la crainte d’être submergé par les jeunes nations tenues à l’écart de notre enrichissement.
L’avenir inquiétait, angoissait même : on fustigea la société de consommation –l’expression était neuve, elle avait surgi à la fin des années 50 dans la bouche d’un ministre à l’affût des mutations sociales et culturelles : en fait, on n’avait encore rien vu, elle ne faisait que commencer !
On se mit, en 70, à parler de « croissance zéro » : n’avait-on plus d’espérance à transmettre ?
Les crises de la transmission n’étaient pas finies.
Aujourd’hui l’interrogation sur le développement a bien changé, on le veut durable, c’est le signe probable que l’on pense de nouveau à demain avec désir et projet.