FÉNELON : ON RAISONNE TROP SUR SOI-MEME
« On raisonne trop, et on se gâte à force de raisonner.
Il y a une tentation de raisonnement, qu’il faut craindre comme les autres tentations.
Il y a une occupation de soi-même, sensible, inquiète, défiante, qui est une tentation d’autant plus subtile, qu’on ne la regarde point comme une tentation, et qu’au contraire on s’y enfonce de plus en plus, parce qu’on la prend comme une vigilance qui nous est recommandée.
On voudrait, par amour-propre, avoir le plaisir de se voir parfait ; on se gronde de ne l’être pas ; on est impatient, hautain et de mauvaise humeur contre soi donc contre les autres.
Erreur déplorable !
Qui vous tiendra la main pour sortir du bourbier ? Sera-ce vous ? Hé ! C’est vous-même qui vous y êtes enfoncé, et qui ne pouvez en sortir.
De plus, ce bourbier, c’est vous-même ; tout le fond de votre mal est de se mettre à la torture, de s’occuper sans cesse de soi-même, de ne pouvoir sortir de vous.
Espérez-vous d’en sortir en vous entretenant toujours avec vous-même, et en nourrissant votre sensibilité par la vue de vos faiblesses ?
Vous ne faites que vous attendrir sur vous-même par tous ces retours.
Sortez donc de vous-même et vous serez en paix. »
( Remèdes contre la dissipation et contre la tristesse Fénelon)