L’éthique semble un mot à la mode, plus moderne que la morale.
Et pourtant, Aristote (384 avant J.C.) écrit son "Ethique à Nicomaque" (le bien, la vertu, la prudence, la sagesse).
L´ "Ethique à Nicomaque" est en quelque sorte pour la tradition philosophique l’ouvrage d´ éthique philosophique par excellence.
Dans l' "Éthique à Nicomaque", Aristote définit la vertu comme quelque chose à laquelle une personne aspirerait - c'est-à-dire, un plus haut bien.
Mais au fait, qu’est-ce que l’éthique ?
Entreprise périlleuse que d’aborder ce mot, car son sens semble avoir évolué vers un concept dont la signification est devenue très subjective : comme chacun peut voir midi à sa porte, on se forge sa propre éthique, en appréciant ce qui est bon ou mauvais à l’aulne du plaisir et du déplaisir, de l’intérêt et de la perte.
Selon l’expression consacrée, chacun à "son éthique pour lui" ; il est aisé de comprendre que cela conduit à une certaine contradiction sociale et politique. Il est donc intéressant de creuser un peu plus le sens de ce mot.
Dans l’usage, on différencie aujourd’hui nettement l’éthique de la morale : en effet, celui qui parle de morale entend que les mœurs doivent se conformer à une loi supérieure aux intérêts particuliers ; tandis que celui qui parle d’éthique sous entend que les lois devraient se conformer à leurs mœurs… mêmes très intéressées.
Le terme d’éthique paraît ainsi plus élégant et politiquement correct que celui de morale, ce dernier étant peut-être trop imprégné de la notion, considérée comme infantilisante, de faute et de culpabilité.
L’éthique serait donc la visée du bien (estime de soi, sollicitude pour les autres, vie dans des institutions justes) (Paul Ricoeur), la morale l’épreuve de la norme, la loi, le normatif.
Et pourtant l’éthique est également normative lorsqu’elle fixe des règles que l’on doit appliquer dans un milieu donné, par exemple, l’éthique médicale ou la bioéthique.
Dans le dictionnaire, l’éthique est la partie de la philosophie qui étudie la morale et ses fondements ; c’est aussi la façon de se diriger, de se comporter (éthique personnelle) en liberté.
Etymologiquement, éthique vient du grec ethicos, de ethos "mœurs, caractère". (Il est à noter que le terme de morale avait originairement le même sens : il vient du latin moralis, de mores : "mœurs").
Sa genèse est liée à l’idée de liberté individuelle, au "je peux", même s’il existe toujours une inadéquation entre le désir et sa réalisation. On pourrait presque établir une sorte de séquence dans le temps :
« Je désire » : intérêt.
« Il m’est possible de réaliser ce que je désire » : liberté
« Je le fais ou non » : selon mon éthique
Louis XIV a écrit à cet effet dans ses mémoires : « Comme il est difficile, lorsqu’on peut ce que l’on veut, de vouloir ce que l’on doit ! »
Et c’est évidemment en rapport aux autres, à autrui, que le choix se détermine. Si nous étions seuls au monde, il n’y aurait pas besoin d’éthique.
L’éthique commence, en fait, au moment où nous reconnaissons que les autres sont également doués d’intérêts et de liberté. En considérant autrui comme un être humain, nous nous obligeons à le respecter en tant que tel, c'est-à-dire à prendre en compte la notion de ses droits personnels, ainsi que d’un bien commun qui n’est pas réductible à la somme des intérêts individuels.
Ainsi, pour que des actes soient "éthiques" il ne suffit pas qu’ils se recommandent d’un "bien" quelconque, car c’est en général toujours au nom du «bien» et pour le "bien" que s’accomplissent les pires oppressions.
Si la justice et les lois sont là pour garantir une liberté "égale" pour chacun, faut-il encore que la liberté de chacun puisse s’inscrire dans un système commun de valeurs partagées.
A cette condition, il est possible de sortir de la contradiction qu’il y a entre le bien commun et les éthiques personnelles.
C’est le fondement de la démocratie.