DIALOGUE
A l’heure où se développent dans les entreprises ce que l’on appelle l’entretien individuel, nous avons un urgent besoin de réapprendre l’art du dialogue, car la vie en commun, pour être sereine, doit passer par là.
Il faut réapprendre une culture du dialogue.
La première étape consiste à suspendre son jugement pour considérer l’autre avec sympathie. Tout commence par là.
Dans leur altérité, les autres sont vraiment « différents », voire capables de nous contredire.
Avoir une attitude de sympathie signifie – dans un premier temps – accepter de ne pas comprendre l’autre tout en partageant ses sentiments.
La vérité de l’autre a la même légitimité que la mienne.
Cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de vérité ou que toutes les vérités se valent.
Chacun peut manifester sa propre vérité avec humilité et doit être disposé à recevoir de l’autre la vérité qui, toujours, nous précède et nous dépasse.
La sympathie implique l’empathie : elle n’est pas un élan qui nous pousserait vers l’autre, mais la capacité de se mettre à sa place, de le comprendre de l’intérieur.
Elle se fonde sur notre dimension humaine, qui nous rend semblable.
L’empathie permet de percevoir que l’existence par nature, n’est jamais isolée ; elle n’existe que dans la communication et dans la conscience de l’existence des autres.
L’égocentrisme, l’indifférence, le cynisme, la rancœur sont vaincus par ce sentiment : on fait ainsi place à l’autre.
Mais la sympathie et l’empathie ne sont que les conditions pour que le dialogue soit possible, fécond de transformations et d’enrichissements réciproques, on ne sort jamais comme on y était entré et le défi du dialogue implique la disponibilité à entreprendre ce chemin.
Dans le dialogue émergent des visions inédites de l’autre ; la fin des préjugés se fait proche : on découvre ce que l’on a en commun mais aussi ce qui manque à chacun.
Dans le dialogue, deux visages se trouvent face à face.
Cet autre que je situais dans une dimension reculée se révèle beaucoup plus proche et semblable à moi que je ne l’imaginais.
La frontière demeure, tout en n’étant plus un lieu de conflits ou de malentendus, mais de pacification et de rencontre.
Si l’on n’attend rien de l’autre, le dialogue meurt avant même sa naissance.
Mais si l’on est disposé à l’accueillir comme un « hôte intérieur », alors se déclenche l’étincelle du dialogue authentique : on offre du temps à l’autre et les paroles qui s’échangent deviennent des dons réciproques.
Les questions de l’autre deviennent les miennes, ses doutes dérangent mes certitudes, ses convictions interpellent les miennes.
On arrive à exprimer des pensées que l’on n’avait encore jamais eues.
Avec la perception fascinante de les sentir à la fois inouïes et familières, on finit par découvrir que l’on possède depuis longtemps des réalités qu’on était convaincu d’ignorer.
Le dialogue avec l’autre permet la découverte inédite de notre propre existence.
Par des mots et des gestes, il fait apparaître l’intériorité qui nous habite.