ATTENTES DE LA VIE PROFESSIONNELLE
La vie professionnelle est l’occasion d’actions avec d’autres, dans un ensemble soumis à des règles.
Les rôles sont distribués ; chacun agit, mettant en œuvre ses compétences avec le souci de voir rémunéré son travail, reconnue sa fonction, garantie son autonomie, préservée sa place, respecté son honneur.
Ces attentes sont d’autant plus grandes que l’investissement dans le rôle professionnel est fort.
Tout y pousse aujourd’hui.
La peur de perdre son emploi, renforcée par le climat d’anxiété généré dans les entreprises par la compétition économique, incite au surinvestissement de soi, de son identité, de son temps de son énergie.
Tout déni de reconnaissance ne peut être vécu que comme une négation de soi, sans remède, sans possibilité de compensation, puisque, largement investi dans son métier, il y a des chances que l’on ne soit plus grand-chose ailleurs.
Cette forme d’humiliation est de plus en plus courante.
Elle est le corollaire du pouvoir que chacun est susceptible d’exercer sur les autres en fonction de la place qu’il occupe dans l’action organisée, cela à partir du moment où il se sert de ce pouvoir comme moyen de s’assurer de soi et de renforcer une identité fragile.
Comment s’en sortir ?
La vie professionnelle doit devenir un apprentissage quotidien qu’il y a toujours un au-delà de son savoir, un au-delà de sa maîtrise.
Mais, précisément, parce qu’elle est créatrice, elle tend aussi à se nourrir de l’orgueil de ses conquêtes et de la jouissance de son apparente puissance sur les choses.
Jusqu’à conduire, par mégalomanie, par idolâtrie, à de véritables catastrophes économiques et sociales.
Car l’orgueil pousse à dénier toute possibilité d’existence à ce qu’on ignore encore, y compris cette forme de soi qui n’est pas encore advenue.
Peut-être saura-t-on faire plus, mais ni mieux ni autrement.
L’orgueil est crispation sur ce que l’on sait de soi, autant sous la forme d’une confiance exclusive en ses propres forces, que sous la forme d’un lâche consentement devant sa propre faiblesse.